Archives de catégorie : dessins

Dessins

IMGP2348

L’hiver roule ces jours gris, les brouillards effilochent les arbres nus. J’ai fermé les portes de mon atelier glacial. Je continue mon travail d’amateur, une exploration de la technique avec les plus simples outils, crayons HB, feuilles et gommes. Pas d’esbroufe, pas de triche, ni couleurs, ni matière juste une infime épaisseur de graphite.

Le juste jugement d’un exercice quotidien où jamais rien n’est acquis.

Chronique jurasienne

Premier instant, un café, je prends le train des hirondelles. C’est un train minuscule qui serpente dans de nombreux tunnels, sur des viaducs et qui traverse des paysages magiques, les voyageurs se laissent bercer par cette échappée et ce petit parfum d’aventure, le voyage peut commencer.

 

Je quitte cet oiseau véloce pour la lenteur de la marche. Après une ville encaissée au fond d’une vallée grise et triste, je grimpe enfin dans la montagne, j’aperçois mon premier chalet authentique, entends mes premières clochettes tinter, je sens mes premières odeurs d’humus et de champignons.

Me voilà seul au monde, je traverse d’immenses forêts et des alpages boueux sans rencontrer âme qui vive. Même les animaux, semblent avoir déserté les lieux, les oiseaux se taisent et l’impression d’une solitude absolue est un peu oppressante. Pas d’horizon, juste des arbres, le poids du sac, les pierres du chemin, le pied qui accroche, le souffle court et l’impression que la marche est à réapprendre.



Alpages

 

 

Plus loin l’horizon s’ouvre, un village au milieu des verts pâturages arbore fièrement son clocher et ses toits de zinc qui gémissent sous la chaleur du soleil. Après une longue descente et une rude journée, voilà la chaleur du gîte, le partage d’un repas, d’une conversation. Un lit et un toit pour se réconforter.


la chapelle du bois

 

Le lendemain c’est un nouveau départ, les courbatures sont vite oubliées et la beauté de la nature fait fondre le poids du sac et s’adoucir les pentes un peu raides. La chance parfois me sourit, je contemple pendant quelques minutes un magnifique chevreuil dans la brume du petit matin, plus loin dans la chaleur de l’après midi, un raccourci me mène à un jeune renard qui trop occupé à sa quête de mulots ne m’entend pas et ne me sent pas arriver. J’observe son jeu et je m’approche doucement mais le voilà s’enfuyant vers une sapinière la queue entre les jambes sans un regard vers l’intrus que je suis.

 

Les pas s’ajoutent aux pas pour former une longue litanie qui se renouvelle de jour en jour. Le monde des habitudes se dissout peu à peu, la simplicité du geste, la lenteur du cheminement ouvre de nouvelles perspectives. Le monde est vaste quand il est parcouru à pied. Je me prête à songer à une autre vie loin des contraintes sociales, une vie simple de pèlerin, une vie faite de liberté absolue et de solitude.


 

nozeroy.jpg

 

Mais l’heure du retour a sonné, les miens m’attendent. La montagne s’éloigne et des collines de far-ouest déroulent l’horizon sous un ciel immense. Une dernière étape dans un charmant village, une rivière naissante que l’on suit. Retour vers ceux que j’aime.

 

source de l ain

Le peuple des marcheurs.

le marcheur

Le peuple des marcheurs est un peuple qui comprend de nombreuses tribus.


Les marcheurs au long cours ne s’arrêtent jamais, ils franchissent les cols et les vallées et leurs pieds agiles effleurent à peine la terre, ils ne laissent pas de traces et leur âme est si légère qu’ils peuvent toucher les étoiles. Vagabonds ou pèlerins leur marche est grave et leur but jamais atteint.

Les enfants quant à eux marchent sans y penser comme s’il s’agissait d’un jeu, leurs petits pieds dessinent des arabesques étranges et leurs trajectoires sont faites d’arrêts et de départs sans cesse renouvelés. Tels des papillons ils flânent sans buts et s’endorment au bord d’un rivage qui les accroche au rêve.

Les femmes marchent en bande. Elles papotent et pépient et leurs bavardages se mêlent à celui des animaux pour former une musique étrange.

Les vieillards eux marchent avec obstination, leur but est connu et leur volonté sans faille, ils savent que chaque pas les rapproche de la fin du voyage et ils continuent le chemin sans rechigner.

Il est aussi des marcheurs aux pieds lourds, ils se reconnaissent à leur équipement barbare, bardée de fer leur âme ne songe qu’à des éclats guerriers et à de terribles machines qui n’apportent que le deuil.

 

Les plus beaux et les plus authentiques sont les nomades qui marchent par nécessité, pour vivre et qui ne vivent qu’en se déplaçant. Leurs pas ont tracé des chemins parcourus depuis des millénaires, leurs troupeaux modelé les paysages. Leurs migrations comme celles des oiseaux et des animaux suivent les saisons ou la nécessité d’un nouveau pâturage, ils voyagent léger et ne s’encombrent que du strict nécessaire à la survie et ne prennent à la terre que ce qu’elle peut donner.

 

Savez vous que ces nomades sont en train de disparaître ? Les voilà rattrapés et parqués par les marcheurs immobiles. Eux ne se déplacent qu’avec leurs machines, ils ne regardent la terre que parce qu’ils peuvent en tirer de la matière ou de l’énergie, ils ne sont que rouages mécaniques et volonté de soumettre. Ils ne songent pas à demain, ne voient pas la beauté du chemin. Ils ne savent pas que l’important n’est pas d’arriver mais que seul compte le voyage.

 

Alors vous tous, vous qui marchez , ne pensez pas à la destination, pensez juste au prochain pas qui vous transformera.

Elfes, korrigans et autres lutins.

Rocher le crapaud Pluescat

Le crapaud

 

 

Il y a longtemps, très longtemps les hommes n’étaient pas maîtres de la terre, ils vivaient dans un monde dangereux où la nature, les animaux et les esprits pouvaient s’allier contre lui. L’ours était vénéré pour sa force, le loup pour son esprit de clan, l’aigle pour sa liberté et sa sagesse.

 

L’esprit humain était encore libre de s’échapper, le chaman savait libérer l’ame du patient, marcher dans ses rêves, communiquer avec l’animal totem. En ces temps reculés, des créatures étranges peuplaient encore le monde, les dragons enlevaient les jeunes vierges, les elfes sortaient à la nuit tombée pour danser dans les clairières que nul humain n’avait parcourus.

 

Le petit peuple des lutins pouvait intervenir dans les affaires humaines d’une manière malicieuse ou sérieuse, égarer le promeneur, lui voler ses affaires, lui dévoiler des trésors ou l’aider à reconquérir l’âme sœur. Le rocher, la source, la clairière forestière étaient leur lieu de vie et les hommes avaient appris à les respecter.

 

Puis petit à petit les rouages de l’esprit ont rationalisé le monde, les hommes rassemblés en villages et en villes n’ont plus communiqué avec les esprits. Les esprits délaissés sont devenus plus exigeants et se sont transformés en dieux. Puis les dieux sont devenus d’essence unique. L’humain s’est retrouvé confronté à une divinité exigeante et lointaine qui n’intercédait pour lui que par l’intermédiaire d’un clergé. La source est devenue abstraite, le rite compliqué, l’esprit a désappris à voler.

 

L’homme aujourd’hui est maître de la terre, il vit dans un monde contrôlé et normalisé, l’ours ne représente plus qu’un gentil jouet de son enfance, le loup a disparu pour sauver le troupeau et l’aigle survit dans un territoire étriqué. Les elfes ont quitté le monde avec leurs lutins et leur cortège de créatures magiques. Les animaux ne sont plus que des éléments économiques ou pire des nuisibles qu’il faut à tout prix éliminer. Les dieux eux mêmes ne nous sont plus très utiles car notre esprit a gagné son autonomie.

 

L’homme n’a désormais plus qu’un seul ennemi sérieux, lui même. Pourtant sa peur ne l’a pas quitté. Il a peur de l’étranger ou de son voisin , il a peur du chômage et du déclassement social, il a peur de la maladie et de la mort, il a peur de la guerre et de la famine qui frappent certains pays. Oui il tremble de peur, seul. Il a oublié les elfes et les lutins, il a oublié les dragons, il a oublié les chimères.

 

Pourtant à l’ombre des rochers, par les nuits sans lune les petites créatures se rassemblent encore, elles attendent que nous les écoutions à nouveau, elles sont encore présentes et peuvent encore nous aider à nous sentir moins seul.

 

 

Carnets de voyages.

J’adore dessiner d’après nature, surtout les paysages, c’est un exercice passionnant qui demande peu de matériel et qui je le crois est à la portée de tous.

 

Je profite donc en général de mes vacances pour pratiquer ce petit exercice, j’utilise soit des crayons aquarellables, soit des feutres complétés ou non avec de l’aquarelle, ou un mélange des deux. J’ai essayé avec du pastel ou de l’huile mais c’est trop long et cela demande une logistique trop importante.

 

Je prend donc mon sac à dos, je marche et puis je me pose. J’englobe le paysage dans ma page et j’essaie de le restituer aussi fidèlement que possible dans un temps pas trop long. C’est une démarche un peu désuète qui me convient très bien.

 

A l’heure de l’internet, du téléphone portable et de l’instantanéité de l’information je prend à contre pied cette rapidité en pariant sur un peu de lenteur, sur l’observation patiente d’une réalité qui s’échappe. Je hume l’air, je regarde les nuages, j’observe les inévitables changement de lumière, je traduis en signes une réalité bien trop complexe pour que je puisse l’apprivoiser sur une petite page de carnet avec mon modeste talent.

 

Cela était autrefois l’essence du peintre et du dessinateur, aujourd’hui l’image est partout et on peut se dire que la peinture a vécue et qu’elle n’apporte plus rien de neuf.

Sans doute, mais ces carnets me remémorent plus clairement ces instants passés qu’aucunes photos ou films ne le feraient.

 

Baie de kernic

La baie de Kernic à marée basse.